jeudi 26 juillet 2012

First day, last exit…

Sur le fil suspendu d’une vie menée tel un équilibriste, Armand n’avait pas tant à dire qu’on aurait pu le supposer. Animé des grands vertiges de vivre exactement dans le chemin dessiné par lui-même, capable parfois d’y déceler l’essence du grand « pourquoi », incapable ensuite, dans le fragment suivant, d’y comprendre seulement quelque chose.

« Si les hommes sont de nature à être plutôt qu’à décider, alors la décision prise n’est qu’une infime parcelle de cet être en mouvance. Si je suis ce que je décide… Où passe tout ce qui de moi demeure inchangé ? »

Sur les proches abords d’une rivière qui n’osait d’elle ne dévoiler que ses eaux de scintillement et, dans la crainte légitime d’une trop brève et juste perception, il ne fallait  donc pas trop lui en raconter.  Tendre la main, respirer, ne jamais oublier qui il était, tandis que les mondes internes s’écroulaient avant de renaître, inexorablement. Dans la genèse d’une nouvelle version de soi, organique… 

Il fallait seulement ouvrir les yeux et ne plus laisser parler son âme. Armand prit donc la main qui lui était tendue et écouta attentivement le vent, partagé dans ses fragrances des mouvances de la raison et des contreforts du cœur. « S’il n’est pas raisonnable de croire en la vertu, puis-je au moins devenir celui qui est attendu ? »

A cette question, le vent ne donnait pas de réponse particulière. Il continuait simplement d’être et d’agir, ni la raison, ni le cœur ne pouvant se départager. Armand prit donc sur le vif un petit chemin de traverse ; derrière lui il laissa la rivière et ses eaux étaient calmes et au devant, les longs flux terrestres mêlés et entrelacés cognaient l’assourdissant écho de la vie humaine. Et tandis qu’il marchait et qu’il ne pouvait imaginer plus, durant un instant il oublia les lignes, de référence, d’horizon et de couverture et par le simple fait d’être celui en mouvance, derrière lui, toujours plus loin, rien ne disparut… 







dimanche 8 juillet 2012

Jazz

La rage vient de mordre,  vague de chaleur étouffante.
D’où surgit ce vacarme de sensibilité, ces torsions incertaines ?

Et le silence qui pourrait tuer
Si l’avide organe nous disait sa condition : je suis impotent.

Tu pourrais répondre autrement
Mais tu acquiesces, la tempête seulement te frôle.

Qui de sa grâce aveugle viendra me prendre ?
Toi encore, je reconnais ton visage.

Je ne devine qu’une infime partie de ce qu’il adviendra lorsque toutes les cartes auront été flanquées par terre.
  
Mon cœur n’est pas une illusion.
Mon âme situe seulement tout ce qu’il reste à faire.

Être nominé ne suffit pas.

Triolets de notes indociles, venus à la rescousse
Atténuer le sommeil
Modifier le rythme.

D’autres encore ont entendu ta mélodie 
Jazz endiablé des esprits mal calmés.

Je t’écoute
Je te suis reconnaissant, toi la musique qui sonne la révolte.  

mardi 3 juillet 2012

Là où réside le vent


« N’écris que ce que tu as vérifié dans ta chair… »
Charles Bukoswki


Les histoires qui nous tiennent à cœur, celles qui bouleversent nos vies et celles de ceux qui nous sont liés, commencent bien souvent sans que l’on s’en rende vraiment compte.  Elles peuvent parfois débuter par quelques lignes légèrement excédantes d’un mail qui ne dit pas encore son nom mais qui délivre clairement une intention. Au-delà de cette intention, est un être qui vit et la réponse qu’il donne n’est pas moins que la réponse qui le fera : « Je ne vais pas te dire non toute ma vie. »

Neuf ans, c’est très long et donc le temps qu’il aura fallu. C’est le temps d’une vie, soudainement devenue nid de cendres puis qui, peu à peu, s’est rebâtie, à bout de souffle d’abord, à force d’aimer ensuite et puis de voir venir au monde quelqu’un qui devient plus important que vous-même. C’est le temps où l’on perd des êtres qui ne nous reviendront jamais, le temps aussi d’assimiler que la vie n’a jamais de cesse de nous apprendre qu’en fin de compte, nous ne maitriserons jamais vraiment rien d’elle.

Après neuf ans, cet évènement hautement improbable s’est finalement produit : nous nous sommes revus. Après le drame de 2002 qui, au-delà de l’abîme insoutenable dans lequel il plongea nos deux vies, les lia toutes deux à tout jamais, sans qu’on ne puisse sincèrement rien n’y changer.

A tout jamais, M… avais-je écrit en 2003, sans doute l’année la plus noire et la plus desséchée de toute mon existence. Quelques mois auparavant, le rêve avait été démoli et il n’en restait plus rien. Mais j’étais encore vivant, sur le fil d’une vie suspendue aux seuls battements exsangues d’un cœur de crevard, éparpillé, mais qui ne voulait pour rien au monde lâcher prise.

En février ou mars de cette année, je me souviens qu’il faisait très froid cette nuit-là, cela se produisit pourtant une fois. Destitué, j’étais perdu dans l’une de ces soirées trance (music !!) légèrement hypocrites, où tout le monde se sourit et s’embrasse un peu trop, mais cependant agréable, de par la puissance du message délivré. La musique cognait et, comme toujours, il me fallait au moins ça.

Je profitais autant que faire se peut du minuscule dancefloor surchauffé, ingérant dans mon ventre les lignes de basse guerrières, dont l’écho à la mitraille interne étaient seules capables, paradoxalement, de m’y soustraire un peu. Je restais des heures à danser et à taper du pied aussi sévèrement que possible, entouré de gens dont les visages commençaient à m’être familiers – la scène trance toulousaine était simplement assez confidentielle -  mais sans pour autant les connaître encore assez pour établir avec eux un échange légèrement plus élaboré que quelques phrases nécessaires et bien senties : « Il est bon le dernier Hux Flux ! » Vers deux heures du matin, j’entendis une sourde rumeur qui devint bientôt réalité, le bar allait fermer ses portes. Un certain Dominique me proposa de m’emmener au Ramier, sur l’ile près du Stade, là où la cogne se poursuivait. Je lui répondis « Oui » sans hésiter. C’était assez loin du bar, il avait une voiture et je n’en avais plus.

Si tôt la décision prise, on prit la route, alors qu’il pleuvait quelques gouttes froides. On arriva un quart d’heure après et on rentra dans l’arène. On fit semblant d’être ensemble pendant quelques instants et puis on fini bien sûr par se perdre. J’errai dans la salle durant environ deux heures, je fumai autant de cigarettes que me permit ma respiration et je bus deux verres. La tabasse n’était pas terrible, en tous cas pas à mon goût, trop collante, trop brutale, tout simplement en de ça du niveau d’énergie requis pour me faire bouger comme je l’aurai souhaité.  Si bien qu’au bout d’un temps, leurs gueules à tous finirent par m’être insupportables, certainement parce que la mienne, en retour, ne leur disait rien non plus, et qu’il n’existait finalement aucune interrelation.  J’étais trop isolé au milieu de la foule alors je la laissai à sa furieuse besogne. Je refis un tour dehors, porté par le maigre espoir que Dominique soit dans les parages et, dans l’idéal, près de sa voiture, prêt à repartir.

Mais Dominique n’était pas dehors. Et sa voiture avait fait place à un joli emplacement vide. Il était parti et le jour ne pointait pas encore. Seuls les lampadaires impavides éclairaient les lézardes un peu séchée d’une mine de circonstance.  Je revins vers l’entrée du Club et n’eus finalement pas le courage d’en franchir de nouveau les portes. Je n’eus pas non plus la force d’apposer sur mon visage les traits d’un gars sympathique cherchant à se faire raccompagner en ville. Quémander à des inconnus un retour motorisé me parût inconvenant. Je ne voulus absolument pas risquer le moindre regard suspect.

« Ok Olivier, me fis-je, tu rentres ! » Je pensai à Dominique un bref instant, l’insultai en silence, allumai une cigarette, levai les yeux vers la ville, le cœur de Toulouse où perdu quelques part au milieu des briques, je retrouverai bientôt les 25 m2 de mon studio dormant sous les toits, tel un cercueil vide. Je me mis en route et je pensais soudainement à elle. Je me mis à lui parler à voix basse, comme on le ferait pour quelqu’un qui a disparu pour toujours : « Où es-tu ? Où es-tu, mon amour ? Vois ce que je suis devenu. Vois l’homme que tu as fait de moi… » Je ne regardai pas le sol en marchant. Je regardai droit au devant, aussi loin que possible, mes pas et mes clopes incarnant les seules frontières encore acceptables, en ses limites inférieure et supérieure, de ce drôle de fragment de moi, la nécessaire poursuite.

Je traversai le pont et je pris par les quais, en suivant la Garonne. Son visage, ses yeux, en mon ventre, étaient ce jour qui, clandestinement, sans que rien ne puisse le laisser présager, écartelait les ténèbres au dessus de la cité endormie. Ce fut toutefois peu avant la Daurade que l’évènement survint. Le mirage s’était enfui et il ne laissait place qu’à un seul trou béant. Je regardai autour de moi, alentours évaporés, l’autre rivage et à cette heure-ci, j’étais absolument seul au monde. Alors mes pas ralentirent d’eux-mêmes et je me rapprochai de l’eau. J’allumai une cigarette avec le mégot encore rouge de celle que je venais de brûler et je me souviens encore des mots que je prononçai alors, tout doucement, de manière presque inaudible : « Ça s’arrête là pour moi… C’était ça l’idée, hein ? Alors, ça s’arrête là pour moi… »

Je me rapprochai un peu plus, jusqu’à ce que l’eau sombre soit juste en dessous de moi, les pieds déjà à moitié suspendus dans le vide. L’eau devait être très froide et il fallait juste se laisser tomber et ne pas se débattre. Je restai comme cela quelques instants seulement, rien qui ne sembla éternel. Je ne vis pas ma vie défiler. Je ne pus que constater, alors que les secondes s’effaçaient progressivement, que je ne pourrai pas commettre ce geste. L’intention m’avait-elle à peine effleuré qu’aussitôt, avant même qu’elle ne se concrétise, elle s’était déjà enfuie de moi. Je ne pouvais pas faire ça et je ne pourrai pas, quoi qu’il advienne. Je repris ma route, un peu sonné tout de même et je ne marchai pas plus vite. Je ne cherchai pas non plus à comprendre précisément ce qui venait de se produire. Je continuai simplement jusqu’à chez moi, en fumant cigarette après cigarette.

Arrivé au troisième étage d’Urbain Vitry, où seuls quelques pigeons malpolis animaient l’aube qui ne naissait pas encore tout à fait, j’ouvris le velux et je regardai la cime de la Basilique Saint Sernin.  Je la revis ici, à mes côtés, quelques mois plus tôt et je pus alors apprécier à sa juste valeur l’immense défi qui se présentait à moi. Ces quelques mois n’étaient que quelques secondes. Je n’avais pas avancé d’un pouce. Je me sentis unilatéralement vide, presque mort, à la seule différence que je savais pertinemment que cela ne me tuerait pas. Du grand amour que j’allais vivre, de cette vie d’Outre-Atlantique que j’allais bâtir, il me restait ce regard unique que nous avions porté ensemble depuis ce minuscule appartement, vers les monts de la Basilique, là où, en un point invisible à l’œil, résidait le vent, là où résiderait pour toujours ce grand rêve que nous avions fait, ce grand rêve que nous avions assassiné.

Alors que la lumière de ce jour de l’hiver 2003 fini enfin par se manifester, mon cœur ne cessa pas de battre. Mais il mourut sans façon, à cet instant où j’intégrai si parfaitement que je devrais continuer, quoi qu’il en coûte, la moitié de mon être perdue au-delà d’un Atlantique devenu bien trop grand, absolu, pour qu’il ne subsiste la moindre chance de fendre ses hautes lames bleues de silence.  


Huit ans et demi plus tard, je reçus donc ce mail, le 7 novembre exactement. Et bien que père de famille, entouré d’une compagne aimante et de deux enfants, je ne dis pas non. J’allai fumer une cigarette et je regardai la nuit. Je ne me souvins pas alors de ce funeste épisode de l’hiver 2003. Je pressentis sans doute qu’il se passait quelque chose d’important mais je ne sus pas en mesurer l’enjeu.

L’enjeu, tout au bout de ce chemin que je m’apprêtai à prendre, ce n’était pas moins qu’une vie de famille que j’allai sciemment faire voler en éclats. Une fois que cette tragédie fut accomplie, à peine trois mois venaient de s’écouler, je repris l’avion et je traversai de nouveau l’Atlantique, presque 10 ans plus tard. Il n’était plus cet abysse insondable mais seulement un océan que l’on survole tranquillement en avion. Tout avait changé, mais rien n’avait changé. Tout avait changé car on ne détruit pas impunément ce qu’on a soi-même bâti. On y laisse une part de soi, sans équivoque, sans artifice, sans avoir besoin de démontrer que cette équation est infaillible. Rien n’avait changé, parce qu’une fois de plus, j’avais remisé l’ensemble des cartes que j’avais en main. Et je m’avançai vers elle, toujours avec la même foi, le même abandon, dans l’espoir de faire vivre ce qui n’avait pas existé dix années auparavant.

En un sens, ce voyage révéla ce qui viendrait par la suite. Il fut éprouvant. Bien plus que nous ne l’avions imaginé l’un et l’autre. Mais il faut bien reconnaître qu’il n’y a pas forcément de drame à vivre, plutôt que d’imaginer. Tous les choix que l’on fait ne se réclament pas de l’imaginaire, ils  sont inscrits dans une vie tangible, dans des liens qui nous unissent aux vivants, à ce qu’ils sont, à ce qu’ils deviennent, à ce que nous devenons ou ne deviendrons pas avec eux. Ils portent en eux une réalité qui peut parfois échapper à la conscience même que nous avons du réel. Ils sont ce que nous sommes, sans que nous sachions nous-mêmes vraiment toujours à quoi nous en tenir.

Quelques semaines plus tard, à la fin d’un mois d’avril qui fut émotionnellement titanesque, je me retrouvai au tribunal de Grande Instance d’Auch, aux confins du Gers, convoqué avec la mère de mon fils pour une audience devant le Juge des Affaires Familiales, qui devait statuer sur la mise en place de la garde de  notre enfant. Nous avions auparavant formulé par écrit une entente définissant les lignes majeures de cette garde. La première des conséquences était déjà connue : je n’élèverai pas mon fils, je ne le verrai plus que par intermittence et cette part là sonnait en moi comme des tambours en feu, cette perte dont on mesure jour après jour l’exactitude de l’impact, dans une espèce d’apprentissage vain.

Nous attendîmes dans une salle d’audience, où tant de pièces humaines avaient été jouées, tant de souffrance ou de discorde apprivoisés par les mots de la Justice, toujours ceux qui savent ce qu’il faut entreprendre pour secourir convenablement les hommes en peine. Durant l’attente, la femme avec qui j’avais partagé presque six ans de ma vie et qui m’avait donné cet enfant que nous aimons tant trouva une place juste derrière moi, à une rangée d’écart. Nous nous étions dit bonjour par un unique « Salut », et nous ne pouvions sans doute pas nous dire plus. Je détestai déjà ce moment. Il allait s’agir de notre fils et de la manière dont l’Etat allait déterminer avec nous ce qu’il conviendrait de faire pour lui, pour l’avenir qu’il fallait lui construire, maintenant que ses parents étaient séparés. Et par-dessus tout, ce lieu et ce moment incarnaient si étroitement la condition à laquelle je ne pouvais échapper : j’étais coupable, absolument coupable. Ce chemin là, il fallait apprendre à en maîtriser l’âpreté, une histoire d’amour qui finit mal, l’histoire d’une famille brisée, l’histoire que je venais simplement d’écrire. Des questions et quelques réflexions me vinrent, toutes plus inutiles les unes que les autres et ayant pris un stylo et un cahier, je les posai sans forcer sur le papier :
« Où sont nos rêves d’enfance ? Qu’est devenue au fond de mon être l’innocence originelle ? Ai-je seulement été un jour innocent ? Je ne suis pas une mauvaise personne et je crois que je suis un bon père. Mai cela ne suffit pas, en vérité, à taire le cri immense de cette humanité meurtrie, à ne pas savoir s’il aurait pu exister une autre voie que celle-ci ; la complication, les choix tranchants, les quêtes inassouvies que l’on refait vivre. Que l’on refait vivre malgré tout, malgré la femme, malgré l’enfant, malgré la famille… Je sais au fond de moi à quel point je m’en veux et je sais également qu’il me faudra du temps pour me pardonner ce choix. Je ne le regrette pourtant pas, car il appartient autant à ce que je suis, à la nature véritable de mon être – qu’il faut que je regarde aujourd’hui sans aucune concession – que je lui appartiens moi, dans la totalité d’une œuvre dont il reste tout à bâtir. »

Je restai ainsi et je regardai les gens autour de moi. Je n’osai pas tourner la tête vers elle, j’étais penché sur le cahier et le stylo à la bouche et je pensais et repensais encore à ce choix. Il me sembla, tandis que j’appréciai l’animation feutrée de la salle, que le choix ne suffisait plus. Au-delà de ce qu’il impliquait, il fallait en saisir l’essence pour espérer l’assumer pleinement et non pas s’en divertir, comme on abandonnerait un film en pleine séance pour aller en voir un autre, du fait d’un peu de lassitude ou par simple goût du changement. Il fallait également dévêtir ce choix pour en révéler le sens profond, car il n’est pas de doute permis qu’il avait profondément bouleversé ma vie mais, avant tout, celle de ceux qui m’étaient jusqu’alors les plus proches.  

On entendit bientôt nos deux noms et une femme menue nous indiqua le chemin. Un homme au visage avenant nous accueilli, cheveux gris, belle moustache, voix douce. Il nous redit ce que nous savions déjà, énuméra les dispositions et pris bonne note des compléments que nous lui donnâmes. Une fois que les termes de notre entente furent approuvés par la Justice, nous ressortîmes du tribunal. Il n’y avait pas eu un seul heurt, un seul mot déplacé. Elle s’était comportée comme une grande dame devant le Juge et son greffier, comme celle qu’elle avait de toute façon toujours été. Sur les marches, alors que nous venions tous deux de retrouver l’air libre et de nous allumer une cigarette, je lui posai maladroitement une question : « Tu t’es garée où ? » Elle ne me répondit pas, me tourna le dos et s’éloigna doucement. Je la regardai quelques instants, le ventre noué, avant de moi-même reprendre le chemin du parking. Je retrouvai difficilement ma voiture et, au moins aussi difficilement, mes esprits. Une fois assis devant mon volant, incapable de reprendre la route, cherchant dans les feuilles d’un arbre planté là tout près de ma voiture une réponse qui ne viendrait pas, je me mis à pleurer.

Je ressentis le besoin de faire quelque chose de plus, mais j’en avais déjà assez fait. Alors j’apposai quelques mots supplémentaires sur le cahier légèrement froissé :
« S’il faut poursuivre et ne pas rompre, alors la dernière marche à gravir se nommera le pardon. Parce que sans pardon, n’existe pas de salut. Il faudra bien accomplir ce travail herculéen que de se pardonner, en cela que l’on ne reconstruit rien de bien fameux dans la colère. La colère que l’on ressent pour l’autre, à juste titre ou pas et puis la colère que l’on éprouve pour soi-même, l’indicible colère de ne pas avoir tenu sa promesse. Et si je suis certain d’une chose aujourd’hui, c’est que demander pardon ne suffit pas. Le pardon doit vivre en nous et nous devons le faire grandir comme on le fait pour l’amour, comme on élève ses enfants, en donnant le tout et le meilleur de soi. Cela doit devenir une part intègre et honnête, inconditionnelle. Aussi, au-delà d’images inaltérables qui n’existent pourtant plus guère, à raison de les avoir soi-même effacés, ne subsistent plus qu’un cœur et une âme dénudés, dans la vérité d’une leçon de vie devenue indispensable, d’un émoi brutal résonnant dans chaque fraction d’une humanité en exergue, dans une vision qui ne cachera rien et surtout, qui ne se cachera pas d’elle-même et de ce qu’elle signifie vraiment, là où le choix devient exactement ce que l’on est, ce que l’on pleure et ce que l’on espère, là où les grands rêves ne suffisent plus de n’être que des rêves, en ce point inatteignable où deux trajectoires se perdent pour se confondre, là où finalement, tout au bout du compte, résident le vent, l’amour, la tempête et le pardon. »

lundi 2 juillet 2012

Le soleil est une étable



Le soleil est une étable

Dont les portes se sont fermées

La résidence d’un rêve, une esquisse évaporée

De nouveau sur le vélo, j’ai roulé dans les ombres

Me sentant l’automne, dans ces premiers jours de juillet

Et dépassant les foules, inaccessibles mondes

Les pères, les mères et les enfants aimés…


J’ai nourri le vent et de tes yeux et de tes lèvres

Les étreintes indivisibles

La pensée comme une épine qui brule

Ces lointains rivages que nous avons foulés


Le soleil est une étable

Dont les portes se sont fermées

Que sera cette vie mon amour,

Quand les songes d’été seront passés ?