Sur le fil suspendu d’une vie menée tel un équilibriste, Armand n’avait pas tant à dire qu’on aurait pu le supposer. Animé des grands vertiges de vivre exactement dans le chemin dessiné par lui-même, capable parfois d’y déceler l’essence du grand « pourquoi », incapable ensuite, dans le fragment suivant, d’y comprendre seulement quelque chose.
« Si les hommes sont de nature à être plutôt qu’à décider, alors la décision prise n’est qu’une infime parcelle de cet être en mouvance. Si je suis ce que je décide… Où passe tout ce qui de moi demeure inchangé ? »
Sur les proches abords d’une rivière qui n’osait d’elle ne dévoiler que ses eaux de scintillement et, dans la crainte légitime d’une trop brève et juste perception, il ne fallait donc pas trop lui en raconter. Tendre la main, respirer, ne jamais oublier qui il était, tandis que les mondes internes s’écroulaient avant de renaître, inexorablement. Dans la genèse d’une nouvelle version de soi, organique…
Il fallait seulement ouvrir les yeux et ne plus laisser parler son âme. Armand prit donc la main qui lui était tendue et écouta attentivement le vent, partagé dans ses fragrances des mouvances de la raison et des contreforts du cœur. « S’il n’est pas raisonnable de croire en la vertu, puis-je au moins devenir celui qui est attendu ? »
A cette question, le vent ne donnait pas de réponse particulière. Il continuait simplement d’être et d’agir, ni la raison, ni le cœur ne pouvant se départager. Armand prit donc sur le vif un petit chemin de traverse ; derrière lui il laissa la rivière et ses eaux étaient calmes et au devant, les longs flux terrestres mêlés et entrelacés cognaient l’assourdissant écho de la vie humaine. Et tandis qu’il marchait et qu’il ne pouvait imaginer plus, durant un instant il oublia les lignes, de référence, d’horizon et de couverture et par le simple fait d’être celui en mouvance, derrière lui, toujours plus loin, rien ne disparut…
1 commentaire:
De sacrée questions existentielles Bro, mais qui ont le mérite d'être posées !
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